Remaniement ministériel : un signal incompréhensible envoyé aux acteurs de la vie associative et de l’ESS
Le Mouvement associatif et ESS France expriment conjointement leur sentiment de lassitude à la suite de l’annonce du nouveau gouvernement marqué par la sortie de la vie associative et de l’économie sociale et solidaire des intitulés des portefeuilles ministériels.
La participation des têtes de réseaux et des organisations qu’elles fédèrent n’a pourtant pas manqué ces derniers temps bien que le dialogue civil s’exerce dans des cadres de consultation aux attributions de moins en claires et à l’influence incertaine. Alors que chaque jour les organisations de la société civile s’emploient à s’impliquer dans les transformations de notre pays, elles font de manière croissante l’objet de méfiances incompréhensibles qui menacent de fait la liberté et la capacité des citoyennes et des citoyens à se réunir et s’exprimer. À ces complexités s’ajoutent celles d’un calendrier parlementaire rendu peu lisible et dans lequel la réaction prend le pas sur la possibilité d’être en projection.
Pourtant, nul ne peut contester le fait que l’Etat a besoin de la société civile pour mener une action publique plus efficace, nourrie de la respiration des initiatives citoyennes et plus justement équilibrée territorialement. Transition écologique, longévité, politique de la ville, inclusion numérique, solidarité et protection, partage de la valeur, innovation… les Français et les Françaises n’attendent pas l’Etat pour s’engager et inventer les modèles qui bien souvent ouvrent les voies des politiques publiques. Les changements se font avec nous, pas uniquement à travers la mise en œuvre de mesures gouvernementales. La recherche de solutions aux blocages de notre société mérite l’implication et la mobilisation du plus grand nombre. Une République peut–elle être autre chose que le régime qui repose sur des citoyens respectés, éclairés et responsables ?
La vie associative et l’économie sociale et solidaire proposent des cadres d’engagement collectifs qui sont souvent des relais, des pionniers et parfois des lanceurs d’alerte de l’intérêt général. Leur tourner institutionnellement le dos ou les traiter avec désinvolture serait absurde.
Si économie sociale et solidaire et vie associative ne se superposent pas, elles partagent des principes communs et des registres d’action que l’expérience d’un secrétariat d’Etat commun a permis de commencer à mieux articuler au sein des politique publiques. Certes il est légitime et souhaitable d’interroger dans une démocratie la cohérence et les continuités de configuration de la puissance publique. Mais l’abandon au bout d’un an et sans évaluation de cette expérimentation est en tout cas un mauvais signal quant à la place accordée aux politiques publiques visant à leur renforcement …
Il est à craindre aujourd’hui que l’invisibilisation de fait par la relégation institutionnelle n’acte un décalage entre la place réelle de la société civile à la fois dans le quotidien et la vie démocratique d’un côté et la considération que l’Etat lui accorde de l’autre. En cela l’invisibilisation est contreproductive : elle compliquera mais ne fera pas taire ni n’empêchera, car les raisons d’agir des citoyennes et des citoyens ne seront pas effacées. Il est urgent que le Gouvernement, quelle que soit l’organisation qu’il choisit, donne des signaux clairs et forts sur sa volonté de prendre en compte cette énergie citoyenne.